Bataille de Carrhes : 9 juin (jour consacré à Vesta) 53 avant J.C. C'est aujourd'hui la ville d'Harran au sud de la Turquie.

Les Parthes (Iran actuel) faisaient partie de la politique impérialiste de Rome vers l'Orient. Après une période où ils cherchaient l'appui des Latins, ils en devinrent les pires ennemis.

Puis vint le premier triumvirat, Crassus qui se trouvait le seul homme d'argent de cette espèce de coalition, voulut égaler ses deux associés en gloire militaire. Il profita de son proconsulat de Syrie pour aller les combattre. Il recherchait la gloire et les richesses.

« Crassus, de son côté, soupirait après quelque entreprise qui pût lui procurer gloire et profit ; mais il ne voyait dans la Syrie rien qui ouvrît un champ favorable à son ambition…Il se mit donc en campagne contre les Parthes, sans avoir rien à leur reprocher … » Dion Cassius, XL, 12.

Il avait alors 61 ans, ses seuls mérites guerriers étaient d'avoir triomphé des bandes de Spartacus et d'avoir combattu aux cotés de Sylla contre Marius ; ce qui a fait dire à Karl Marx : «  c'était un général romain ordinaire  » (phrase reprise par Giusto Traina dans son livre « Carrhes », les Belles Lettres, 2011). Ce qui l'amena au proconsulat de Syrie fut d'avoir été consul en 55 avant J.C. avec Pompée. A cette époque, Rome menait une politique d'agression vis-à-vis de ses voisins et c'est tout naturellement qu'il voulut aller se battre contre les Parthes, voisins de son nouveau gouvernement. Ses adversaires mirent tout en œuvre pour l'empêcher de partir, notamment un tribun de la plèbe : Caius Aetius Capiton.

« Mais le tribun Atéius voulait s'opposer à son départ ; et à lui se joignaient beaucoup de personnes qui trouvaient mauvais qu'on s'en allât faire la guerre à des gens qui n'avaient aucun tort, et avec lesquels il existait des traités. Crassus, qui craignait les suites de cette opposition, pria Pompée de lui prêter son appui, et de l'accompagner hors de la ville, parce que Pompée exerçait une grande influence sur la foule. Beaucoup se préparaient à se mettre sur le chemin de Crassus, et à pousser des clameurs contre lui. Pompée s'avança vers eux : ses regards et son visage serein les calmèrent ; ils se retirèrent en silence, et ouvrirent un passage au milieu d'eux à Pompée et à Crassus. Cependant Atéius se présente au-devant de Crassus, et le somme à haute voix de suspendre sa marche, protestant contre son entreprise ; puis il donne ordre à un huissier de l'appréhender au corps, et de l'arrêter. Les autres tribuns ne le permirent point, et l'huissier relâcha Crassus. » Plutarque, Crassus.

Pour financer son entreprise, il pilla le temple de Jérusalem.

Son plan était, dans un premier temps, d'envahir la Mésopotamie qui était une pièce principale de l'empire parthe, l'objectif final en était la capitale de ce même empire : Ctésiphon. Devant lui se dressait l'armée parthe qui s'était divisée en deux parties, l'une sous la conduite du roi Oronte devait s'assurer de l'Arménie pour les empêcher de fournir aux Romains les contingents de troupes qu'ils leur avaient promis, l'autre fut placée sous le commandement de Suréna, qui, aux dires de Plutarque, était le second personnage du royaume parthe. C'est lui qui va affronter Crassus.

« Suréna n'était pas un homme ordinaire. Par sa richesse, sa naissance, sa gloire, il était le premier après le roi ; par son courage et son habileté, il l'emportait sur tous les Parthes de son temps. Pour la taille et la beauté du corps, il n'avait point d'égal. Quand il était en marche, il menait toujours avec lui mille chameaux chargés de ses bagages, et deux cents chariots portant ses concubines…Il n'avait pas alors trente ans, et il avait une fort grande réputation de prudence et de sagesse dans les conseils. » Plutarque, Crassus.

L'arme principale à laquelle l'armée romaine va se heurter est la flèche, d'ailleurs Catulle appelle les Parthes « porteurs de flèche ». Elle pouvait aller deux fois plus loin que des flèches romaines car elles étaient tirées à partir d'un arc composite dont les branches étaient faites de cornes de chèvres et la corde de tendon de cerf ; tout cela permettait une forte tension. La cotte de mailles ou l'armure du légionnaire romain était facilement transpercée.

Le roi d'Arménie lui conseilla d'attaquer le royaume arsacide par le nord ce qu'il ne voulut pas écouter. Crassus voulut traverser le désert syrien et atteindre l'Euphrate. En rejoignant le fleuve, il apprit que ses ennemis lui barraient le passage, un peu plus à l'est, au sud de la ville de Zeugma. Lorsque l'armée de Suréna arriva, ce fut une surprise totale pour les Romains qui pensèrent n'avoir à faire qu'à une avant-garde : ce dernier avait soigneusement dissimulé sa cavalerie lourde :

« C'est que Suréna avait placé ses masses derrière la première ligne, et qu'il avait voilé l'éclat de leurs armes, en donnant l'ordre de les couvrir d'étoffes et de peaux. » Plutarque, Crassus.

Le combat va se dérouler sur un terrain plat favorable à des manœuvres de cavalerie. L'infanterie romaine ne put jamais s'engager à fond, elle avait en face d'elle une cavalerie légère qui faisait pleuvoir sur elle une pluie de flèches et se dérobait sans cesse :

« Tant que les Romains espérèrent qu'après avoir épuisé leurs flèches les Parthes cesseraient le combat ou qu'ils en viendraient aux mains, ils soutinrent bravement l'attaque. Mais, lorsqu'on sut que près de la se tenaient un grand nombre de chameaux chargés de flèches, et que les premiers rangs qui avaient donné en allaient reprendre en faisant un circuit, alors Crassus, ne voyant plus de terme à ses maux, perdit courage. » Plutarque, Crassus.

Au début de la bataille, Crassus avait disposé son armée en longue ligne avec la cavalerie sur les cotés puis il fit serrer les rangs, la troupe se forma en carré avec les soldats montés au milieu. Une masse compacte se trouva ainsi constituer qui devrait faire face à toutes les situations. Une charge de l'infanterie romaine ayant échoué devant les flèches décochées par une cavalerie ennemie en perpétuel mouvement, il décida de faire appel à la cavalerie gauloise que son fils cadet, Publius, qui avait servi sous les ordres de Jules César, avait amenée avec lui. Il espérait apporter un peu de répit à ses légionnaires et pouvoir ainsi former une espèce de tortue. Mais, Publius fut trop téméraire, il s'élança à la poursuite des cavaliers-archers avec ses hommes et de l'infanterie qui le conduisit devant les cataphractes (autres cavaliers, totalement cuirassés). Ils furent à nouveau accablés de flèches et décimés par cette cavalerie lourde. Publius et un de ses tribuns trouvèrent la mort tandis qu'un autre, Megabacchus, se suicida. La tête du fils fut fixée au bout d'une pique pour que le père la vit, l'effet fut celui attendu puisqu'il en fut profondément prostré. Les fantassins qui lui restaient furent à nouveau harcelés par les archers puis se trouvèrent face à face avec la cavalerie lourde. Survint la nuit qui suspendit les hostilités, les Parthes ne combattaient dans l'obscurité (selon Dion Cassius). Les troupes survivantes s'enfermèrent dans la ville de Carrhes où elles rejoignirent une garnison romaine. Ils décidèrent de quitter la ville et l'armée se divisa. Une partie s'en fut avec le questeur de Crassus, Cassius, vers la Syrie. Peu à peu le triumvir se retrouva abandonné. Il décida de se réfugier en Arménie avec les 4 cohortes qui lui restaient. C'est alors qu'une partie de l'armée vaincue, sous les ordres du légat Octavius, revint sur ses pas et augmenta d'autant ses forces. Suréna voulut négocier et au cours de la rencontre du Parthe et du Romain, soit trahison soit incompréhension mutuelle , Crassus fut tué au cours d'une escarmouche dont nul ne comprit l'origine. Plutarque raconte que la main droite et la tête du général romain furent tranchées pour être envoyées au roi Orode. Les survivants romains qui étaient prisonniers furent emmenés à Séleucie (cité d'origine grecque, grand centre commercial de l'empire parthe) où ils durent défiler sous les injures de la foule dans une parodie de triomphe. Les Romains eurent 30.000hommes de tués ou de blessés, 10.000 hommes réussirent à s'échapper et allèrent se réfugier à Antioche.

Carrhes marque la fin de l'expansionnisme romain en Orient. Après, il n'y eut plus que des conquêtes temporaires.

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