Pompée et les pirates, la « lex Gabinia » (67 avant J.C.) :
De tout temps, Rome fut confrontée au problème de la piraterie. Mais, dans les dernières années de la République, cette présence devint catastrophique. Les gens qui étaient obligés de prendre la mer risquaient la capture ce qui était synonyme d’esclavage pour les plus pauvres ou d’énormes rançons pour les plus riches. Même le littoral avec ses villages proches de la mer n’étaient pas à l’abri de razzias. Rome vit les cours du blé (qui était devenu une denrée rare) s’envolés, l’approvisionnement se faisait par la mer et les voies de communication étaient coupées.

Avant l’intervention décisive de Pompée, plusieurs généraux romains avaient tentés d’éradiquer les pirates. Déjà en 102 avant J.C. intervint le grand père du futur triumvir, Marc Antoine l’Orateur, il mena une expédition couronnée de succès contre la Cilicie qui était un des principaux territoires accueillant les pirates. Cet exploit guerrier lui valut un triomphe et l’autorisation du Sénat de décorer la tribune des Rostres d’éperons de navires qu’il avait capturés. Mais le problème de la piraterie ne fut pas résolu pour autant car rien ne fut prévu pour une occupation durable du site privilégié des brigands. Un autre personnage politique romain, Publius Servilius Vatia fut désigné par le Sénat pour anéantir les pirates. Pendant 4 ans, il va les combattre, anéantir toutes leurs bases côtières. Il les repousser dans les montagnes, sa victoire va être totale. Il va s’emparer de la principale ville occupée par les brigands des mers : ISAURA (ville d’Issaurie, région située entre la Cilicie et la Phrygie) d’où son surnom de d’ISAURICUS. Il aura droit à un triomphe. Mais ses adversaires survivants vont se réfugier sur l’ile de Crête à partir de laquelle ils vont continuer leurs exactions.
Les deux lieux principaux d’où partaient les pirates étaient la Cilicie et celle-ci.
                                            
Plus particulièrement, la région de Cilicie à partir de laquelle les pirates lançaient leur expédition était La Cilicie Trachée. Déjà dans la haute antiquité, cette région fut occuper par les Cariens qui étaient, eux aussi, des brigands-pirates. Cette région fut, donc, de tous temps un abri pour eux. Ils y trouvaient  des refuges (même des villes fortifiées) et tout le nécessaire pour la construction de leurs navires, surtout du bois dont la région était abondement pourvue. Il faudra attendre Pompée pour que ce territoire soit annexé à Rome.
Comme on l’a vu, une fois la Cilicie vaincue, les pirates vinrent se réfugiés chez les Crétois. A cette époque, l’ile avait une très mauvaise réputation, le nom de Crétois était synonyme de menteur, de fourbe.
Croyant qu’il pourrait rétablir l’ordre sur la mer Méditerranée, le Sénat va investir Marc Antoine Creticus (fis de Marc Antoine l’Orateur) d’un commandement trop lourd pour ses épaules. Il va vouloir tirer un maximum de profit de sa nomination mais il ne connaitra que  défaite sur défaite. Pourquoi ce surnom ? Par dérision, ce surnom va rappeler l’ile qu’il n’a pas su conquérir, l’ironie est que le mot ne veux pas dire vainqueur de mais, ici, vaincu par.
Maintenant, la Méditerranée, toute entière, est aux mains des pirates. Nul n’est à l’abri de leurs méfaits, Jules César, lui-même, fuyant la dictature de Sylla, en est l’exemple le plus connu. Ostie, le port de Rome, est inquiété. C’est dans ce contexte qu’en 67 avant J.C. Aulus Gabinius, tribun de la plèbe, (soit à l'instigation de Pompée, soit pour lui complaire ; car c'était un très mauvais citoyen, nullement inspiré par l'amour du bien public) Dion Cassius XXXVI, 21.
va intervenir en présentant une loi. Elle prévoyait de donner un pouvoir militaire absolus sur la Méditerranée à un général, cette autorité devait, en outre, s’exercer sur un bande de terre littorale d’une profondeur d’à peu près 75 kms. A ce moment là, le nom de Pompée n’était pas encore prononcé mais il était sur les lèvres de tout le monde. Le Sénat ne va pas entériner ce projet de loi, il va résister de toute ses forces contre le fait de donner un pouvoir exorbitant à un seul homme, il savait qu’il ne pourrait faire de lui son homme de paille, il va essayer de susciter une opposition en la personne d’un autre tribun du peuple qui va s’opposer à Gabinius. Le Sénat connaissait très bien les liens amicaux qui unissaient Pompée à Gabiniu., celui-ci voulait ouvrir au premier les chemins du pouvoir. Le peuple soutenait Pompée  et voulut massacrer les sénateurs qui s’opposaient à lui. Gabinius dut intervenir pour éviter un bain de sang.
Les pouvoirs du futur triumvir furent confirmés par le peuple. Pompée va diviser la Méditerranée en treize secteurs. Il choisit pour le représenter quinze légats, revêtus chacun de l’imperium. Ce nombre fut porté à  vint cinq. Il eut 500 vaisseaux, 120.000 fantassins et 36.000 deniers avec la possibilité de puiser dans le trésor au fur er à mesure de ses besoins. En fait les auteurs anciens ne sont pas d’accord sur le nombre de navires qui lui furent confiés, on va de 200 à 500, c’est comme pour les cavaliers, on va en compter de 4.000 à 7.000. La durée de la guerre va être de 40 jours ou de plusieurs mois suivant si on prend en compte le début des hostilités ou si l’on regarde depuis les préparatifs du conflit. Les peuples alliés des Romains furent mis à contribution. Ils durent apporter leur soutien en hommes et en matériels, les vaisseaux Rhodiens (de Rhodes-Dodécanèse) furent les meilleurs.
La première action de Pompée va être de sécuriser l’Italie et surtout son approvisionnement en céréales.
 Après l’Italie, il va s’occuper de libérer la Méditerranée Occidentale du détroit de Gibraltar à toute la Gaule. Puis, il va vers l’Orient où il va appliquer une politique de souplesse pour que la Cilicie se rende, seuls seront inquiétés les pirates qui vont persévérer dans le brigandage.
Donc en 40 jours, des colonnes d’Hercule au fin fond de la Méditerranée, la mer fut nettoyée. Les pirates vaincus, la navigation commerciale put reprendre normalement. A Rome, les céréales comme le blé était nécessaire à l’Annone, enfin elles arrivèrent comme par le passé. Les cours reprirent un niveau normal.
Les historiens anciens parlent de 400 vaisseaux capturés, de 1300 coulés et de 20.000 prisonniers. Pompée les éloigna du rivage et en fit des agriculteurs dans l’arrière pays de la Cilicie et de l’Arménie. Une foi la victoire acquise, Pompée partit vers l’Orient, il y va pour succéder à Lucullus dans la guerre que mène Rome contre Mithridate et qui s’enlise, il va une nouvelle foi être vainqueur. Ces différentes victoires vont être saluées par un triomphe qui va durer deux jours. Malgré sa victoire, la piraterie ne disparut pas complètement de la Méditerranée ; l’éradication était une vue de l’esprit, aux travers d’une courte guerre, Pompée l’a seulement ramenée à des proportions bien moindre.
Parallèlement à l’action du futur triumvir, le Sénat décida de conquérir l’ile de Crète qui, comme on l’a vu, était un refuge pour les pirates. Pour réussir son projet, il envoya Quintus Metellus avec trois légions. Devant sa cruauté, les Crétois préférèrent se rendre à Pompée. Ce dernier voulut se faire obéir du proconsul et lui envoya un de ses légats, Lucius Octavius. Il fut contraint de combattre aux cotés des brigands tellement la réaction de Metellus fut agressive et Octavius fut vaincu. Metellus, devant les troupes assemblées, lui retira son insigne de commandement et le renvoya ignominieusement après l’avoir copieusement injurié. Le proconsul termina la conquête de l’ile et reçut le surnom de «  Creticus ».   

Ajouts : -Gabinus voulut accompagner Pompée dans son combat mais le Sénat l’en empêcha.
-Jules César fut un chaud partisan de la « lex Gabiia ».
-L’écrivain Varron qui était un grand marin fut choisit comme légat par Pompée.

                                                                                                                               bibliographie :  « Les pirates contre Rome », Claude Sintes , éditions « Les Belles Lettres », 2016.