ESSAI SUR LA CANDIDATURE

Quintus Cicéron

publiés sous la direction de M. Nisard

1841

 

 

I. Bien que tu possèdes en quantité suffisante tout ce que les hommes obtiennent par le talent, l'expérience ou l'application, pourtant, en raison de l'affection que je te porte, j'ai pensé qu'il n'était pas déplacé de mettre par écrit ce qui me vient à l'esprit parce que je pense jour et nuit à ta candidature : je ne crois pas que tu y apprendras quelque chose de nouveau mais que tout ce qui est dispersé et sans logique sera disposé rationnellement et logiquement en une seule fois. Bien que le caractère ait beaucoup d'importance, par un travail de quelques mois une simulation peut vaincre ce caractère. Réfléchis sur ce qu'est l'Etat : que recherches-tu? qui es-tu?. Presque chaque jour pendant que tu descends au forum tu dois te répéter en toi-même : "je suis un homme nouveau", "je suis candidat au poste de consul," "on est à Rome". Tu vas remédier à la "nouveauté" de ton nom par la magnificence de ton éloquence.
C'est ce qui toujours t'a rapporté le plus de prestige. Un homme qui est jugé digne de défendre des consuls ne peut pas être jugé indigne du consulat.
C'est pourquoi, puisque ton point de départ est ta réputation dans ce domaine et tout ce que tu es provient de là, sois prêt à prendre la parole comme si dans chaque cause individuelle que tu plaides ta réputation entière dépendait du jugement. Fais en sorte que ces aides à tes capacités normales, je sais que tu en as en réserve en toi, soient toujours prêtes et toujours disponibles; et rappelle-toi ce que Démétrius a écrit au sujet de l'application et des exercices de Démosthène. Ensuite, veille à ce que le nombre et le rang de tes amis soient vus de tous. As-tu ce qu'ont eu les hommes nouveaux? Tu as tous les publicains, presque la totalité de l'ordre équestre, beaucoup de municipes te sont tout particulièrement dévouées, tu as beaucoup de personnes que tu as défendues : des hommes de chaque ordre, beaucoup de collèges, sans compter un grand nombre de personnes de la nouvelle génération qui se sont attachés à toi dans leur enthousiasme pour la rhétorique, et, pour finir, tes amis qui te rendent visite tous les jours en grands nombres et avec une régularité constante. Veille à maintenir ces avantages en rappelant ces personnes, en faisant appel à elles, et en employant tous les moyens pour les inciter à comprendre que c'est le moment, et le seul, pour ceux qui te doivent quelque chose de montrer leur gratitude, et pour ceux qui souhaitent tes services, qu'il n'y aura à l'avenir aucun autre moment de s'engager pour toi. Il semble également qu'un "homme nouveau" peut être beaucoup aidé par le fait qu'il est bien vu des nobles et surtout des anciens consuls. Il est utile que les gens qui sont à la place et au rang que tu désires avoir pensent que tu es digne de cette place et de ce rang. Tu dois les solliciter, tu dois leur envoyer des gens et tu dois les convaincre que nous avons toujours eu les mêmes sentiments que les Optimates en politique et que nous n'avons eu que très peu de rapports avec les Populares: que si nous avons, semble-t-il, eu un discours "populiste" c'était en vue de nous adjoindre Pompée pour avoir cet homme important activement de notre côté lors de notre candidature ou du moins pour qu'il ne s'y oppose pas. En outre évertue-toi à avoir de ton côté les jeunes nobles, du moins garde l'affection de ceux que tu possèdes. Ils contribueront beaucoup à ta position politique. Tu en as beaucoup; fais-leur croire que ce que tu penses dépend d'eux: si tu en arrives à ce que ceux qui ne refusent pas veuillent franchement, ils te seront alors fort utiles.

II. Que des nobles soien tes concurrents est un avantage pour ta "nouveauté" de sorte qu’il n’y a personne qui oserait dire que leur noblesse doit leur être plus utile que ton caractère élevé. Par exemple, qui pourrait imaginer P. Galba et L. Cassius, cependant par la naissance de la plus haute noblesse, comme candidats pour le consulat? Tu vois donc qu'il y a des hommes des familles les plus nobles, qui par défaut de capacités ne sont pas égaux à toi. Mais, tu diras, que Catilina et Antoninus sont redoutables. Plutôt je devrais dire qu'un homme énergique, actif, vertueux, de grande éloquence et fort populaire avec ceux qui sont les juges finaux, devrait souhaiter avoir comme rivaux deux personnes meurtrières depuis l’enfance, deux personnes débauchées, deux personnes dans le besoin. Nous avons vu mettre en vente la propriété de l’un de ceux-ci et nous l’avons réellement entendu déclarer sous serment qu'à Rome il ne pouvait pas lutter avec un Grec pour obtenir un jugement impartial. Nous savons qu'il a été éjecté du sénat par le jugement des meilleurs censeurs: durant notre préture nous l'avons eu comme concurrent, avec des amis tels que Sabidius et Panthera pour le soutenir, parce qu'il n’y a eu personne d'autre pour plaider pour lui lors de l’examen. Pourtant durant sa fonction il a acheté une maîtresse sur le marché des esclaves et il la gardait ouvertement chez lui. D'ailleurs, lors de sa candidature au consulat, il a préféré voler tous les aubergistes, sous le prétexte honteux d'une "libera legatio", plutôt qu'être dans la ville et d’implorer le peuple romain. Mais l'autre! Bons dieux! quelle est sa distinction? Est-il de naissance également noble? Non. Est-il plus riche? Non.
En courage alors! Alors oui. Alors qu'Antoine craint son ombre, lui ne craint même pas les lois! Un homme né dans la maison d'un père en faillite, élevé dans la débauche d’une soeur, fortifié au milieu du massacre de ses concitoyens, dont la première entrée à la vie publique fut accomplie dans le massacre de chevaliers romains! on s'en souvient : Sylla avait mis Catilina à la tête de ces Gaulois : ils coupaient les têtes des Titinius et Nanneius et Tanusius: et au milieu d’eux Catilina tuait de ses propres mains le meilleur des hommes, le mari de sa propre soeur, Quintus Caecilius, un chevalier romain, qui n’appartenait à aucun parti, toujours paisible par inclination et mais aussi par l'âge.

III. Pourquoi devrais-je parler de lui comme un candidat pour le consulat : cet homme qui frappa à coups de ceps de vignes, sous les yeux du peuple romain, à travers toute la ville, M. Marius, l'homme le plus aimé du peuple romain, le poussa devant lui jusqu'à son bûcher, le déchiqueta dans les pires tortures et alors qu'il vivait encore, lui coupa de la main droite la tête d'un coup d'épée, alors que de la gauche il le tenait par les cheveux et il porta la tête de sa main alors que des ruisseaux de sang lui dégoulinaient sur les doigts. C'est cet homme qui ensuite vécut avec des acteurs et des gladiateurs de façon à avoir les uns comme compagnons de sa débauche, les autres comme ceux de ses crimes. Lui qui jamais n'approcha d'un endroit si sacré ou saint sans, même si on ne commettait aucun crime, laisser cependant par ses dérèglements le soupçon du déshonneur. Lui qui recruta ses meilleurs amis, au sénat les Curii et les Annii, dans les salles de vente les Sapalae et les Carvilii, dans l'ordre équestre les Pompilii et les Vetii. Cet homme qui eut tant d'audace, tant de débauche, tant d'art et d'efficacité dans le vice qu'il a violé de jeunes adolescents presque dans les bras de leurs parents. Pourquoi encore te faire mention de l'Afrique ou des paroles des témoins? C'est bien connu et lis les à plusieurs reprises.
Néanmoins, je pense que je ne dois pas passer sous silence le fait qu'il est parti de son procès aussi pauvre que l'étaient les juges avant ce procès et qu'ensuite il fut tellement haï qu'une autre poursuite fut entamée contre lui tous les jours. Il se comporte de telle façon qu'on le craint plus quand il ne fait rien qu'on le méprise quand il bouge. Tu as plus de chance dans ta candidature que récemment un homme nouveau, C. Caelius. Celui-ci posait sa candidature avec deux hommes d'une noblesse telle que chez eux tout valait plus que cette noblesse elle-même : de très grandes qualités, un sentiment élevé du devoir, un sens de l'Etat élevé, une méthode et un soin scrupuleux lors de la campagne électorale. Mais Cælius, cependant bien que fort inférieur par sa naissance et à peine supérieur dans le reste, l'emporta. C'est pourquoi, si tu fais ce que te donnent largement tes capacités et les études que tu as toujours poursuivies, ce que les exigences de ta position actuelle réclament, ce que tu es capable de faire et ce que tu dois, la lutte ne sera pas difficile contre des concurrents qui ne sont nullement aussi remarquables par leur naissance que connus pour leurs vices. Quel citoyen pourrait-on trouver si stupide pour souhaiter par un seul suffrage dégainer deux poignards contre l'Etat ?

IV. Après avoir exposé quels avantages tu possèdes et tu pourrais posséder grâce à ta "nouveauté," je pense que je dois maintenant dire un mot sur l'importance de ta candidature. Tu postules le consulat : personne ne te juge indigne de cet honneur mais beaucoup de gens sont jaloux. Toi, un homme de l'ordre équestre, tu postules la place la plus élevée de l'Etat, place qui apporte beaucoup plus de grandeur à un homme courageux, éloquent, vertueux qu'aux autres. Ne suppose pas que ceux qui ont déjà obtenu cette charge ignorent la position politique que tu occuperas quand tu seras sur le même pied qu'eux.
Je soupçonne, cependant, la jalousie chez ceux qui, nés de famille consulaires, n'ont pas atteint la position de leurs ancêtres, à moins qu'ils ne t'aiment vraiment. Je pense que même les "hommes nouveaux" qui ont été préteurs, à moins d'avoir de grands engagements à ton égard, n'aiment pas que tu surpasses leurs magistratures. Et même dans le peuple lui-même, il y en aura beaucoup de jaloux, beaucoup de gens d'hostiles aux "hommes nouveaux" par conservantisme : tu dois le savoir. Et nécessairement seront fâchés ceux pour qui tu as plaidé. Pense aussi attentivement à ceci : est-ce que, à ton avis, des gens sont tes ennemis parce que tu t'es consacré avec un tel zèle à promouvoir la gloire de Pompée.
C'est pourquoi, puisque tu postules la tête de l'Etat et puisque tu vois qu'il y a de l'opposition contre toi, tu dois nécessairement mettre en oeuvre tous les moyens, toute ta vigilance, ta peine et ton empressement.

V. Quand on se présente candidat à une fonction publique, il y a deux choses à faire : la première concerne l'attachement de ses amis, l'autre le suffrage populaire. La fidélité de ses amis doit être scellée par des services, des obligations, par la durée, par le bon caractère et le charme de ton tempérament.
Mais ce mot "ami" a une connotation plus large lors d'une campagne électorale que dans la vie courante. Tout qui montre le moindre signe d'inclination pour toi, qui te rend visite, doit être considéré comme un ami. Cependant tes amis de toujours, ceux de ton sang ou de ta parenté, ceux de ton club, ceux qui ont des liens avec toi, ceux-là il faut absolument que tu les chérisses et que tu les cajoles. Ensuite tu dois faire de grands efforts pour que tes intimes et ceux qui te sont les plus attachés chez toi t'aiment et désirent vivement que tu aies la position la plus élevée possible : je veux parler des gens de ta tribu, de tes voisins, de tes clients et enfin de tes affranchis et même de tes esclaves : tout ce qu'on dit sur ta réputation émane de sources domestiques. En un mot, tu dois organiser tes amis de chaque classe; pour faire illusion, les gens remarquables par leur fonction ou leur nom (même si ils n'ont pas de réelle utilité, ils apportent quelque prestige à un candidat); pour garder tes droits, des magistrats (surtout des consuls puis des tribuns de la plèbe); pour engranger les voix des centuries, des gens de grande popularité. Ceux qui, par ton influence, gagnent ou espèrent gagner la voix d'une tribu ou d'une centurie, ou tout autre avantage, rassemble-les et assure-toi d'eux par tous les moyens possibles. Car durant ces dernières années les ambitieux se sont efforcés d'obtenir des membres de leur tribu l'aide qu'ils demandaient. Fais en sorte que, avec tous les moyens que tu trouves, que ces gens te soient attachés le plus solidement possible. Si, en effet, les hommes étaient aussi reconnaissants qu'ils doivent l'être, tout devrait bien aller : je suis persuadé que cela ira bien. Pendant ces deux dernières années tu as reçu le soutien de quatre clubs d'hommes influents pour les élections : ceux de C. Fundanius, Q. Gallius, C. Cornelius et C. Orchivius. Quand ils t'ont confié leur défense, je sais que les membres de leurs clubs t'ont accepté et l'ont confirmé : je le sais parce que j'y étais. C'est pourquoi, dans les circonstances actuelles, tu dois exiger d'eux leur dû en leur rappelant souvent, en leur demandant, en les houspillant et veillant à ce qu'ils comprennent bien qu'ils n'auront plus jamais d'autre occasion de montrer leur gratitude. Je ne puis douter que ces hommes, par espoir de vos services futurs et à cause des avantages récemment reçus, seront poussés à faire un effort actif. Et pour résumer, puisque ta candidature est surtout soutenue par cette catégorie d'amitiés que tu as gagnées comme avocat quand tu as défendu leur cause, fais en sorte que chez tous ceux qui te sont obligés, leur obligation soit clairement définie et déterminée. Comme tu ne leur a jamais rien demandé en retour, fais leur comprendre que tu as réservé à ce moment précis tout ce, qu'à ton avis, ils te doivent.

VI. Mais puisque les hommes sont principalement amenés à te soutenir lors du vote pour trois considérations - le service rendu, l'espoir, la sympathie et les bons sentiments - il faut voir comment tirer profit au mieux de chacune d'elles.
Par des menus services, on peut amener des gens à considérer qu'ils ont une raison suffisante pour donner leur voix lors du scrutin, et c'est certainement le cas de ceux que tu as fais acquitter (et leur nombre est très élevé) : il faut qu'ils comprennent que, si à ce moment critique, ils ne font pas ce que tu leur demandes de faire, ils n'auront jamais plus l'occasion de le faire. Vu la situation, on doit faire appel à eux et on doit faire croire aussi à ceux qui jusqu'ici ont été nos obligés, qu'ils peuvent maintenant à leur tour nous obliger. Ceux, ensuite, qui sont poussés par l'espoir (il faut être très attentif à cette catégorie de personnes), tu dois faire en sorte de les convaincre que tu es prêt à les aider à tout moment et de leur faire comprendre que tu observes soigneusement leur manière d'exécuter les obligeances qu'ils ont envers toi et qu'il est clair que tu vois clairement et que tu notes la valeur de l'appui que chacun d'eux t'apporte. La troisième catégorie dont je t'ai parlé est celle des amis affectueux et sincères : tu dois t'assurer de cette catégorie par des expressions de ta gratitude; tu dois régler tes paroles avec les motifs qui paraissent les influencer à te soutenir; tu dois prouver la sympathie que tu as envers eux et tu dois suggérer que ton amitié pour eux peut mener à l'intimité et aux rapports familiers. Parmi toutes ces catégories, réfléchis et soupèse soigneusement ce que chacune peut t'apporter afin de savoir comment tu vas t'occuper de chacune d'elles et ce que tu demandes et ce que tu attends de chacune d'elles. Certains hommes sont populaires dans leur voisinage et dans leur municipe, d'autres possèdent de l'énergie et de la richesse : même si ils n'ont pas jusqu'ici recherché une telle popularité, ils peuvent encore facilement l'obtenir à l'heure actuelle pour celui de qui ils sont débiteurs ou par simple bon-vouloir. Tu dois faire attention à cette catégorie de personnes pour qu'ils sachent ce que tu attends d'eux, tu dois savoir ce que tu reçois et te rappeler ce que tu as reçu. Il y en a d'autres qui n'ont aucune influence ou qui sont franchement détestés par leurs tribus : ils n'ont ni l'esprit ni la capacité de faire un effort pour sortir de leur situation : tâche de les reconnaître pour ne pas être déçus en mettant trop d'espoir en une personne.

VII. Mais bien que tu doives compter et t'appuyer sur des amitiés que tu t'es faites et que tu as enracinées, pendant ta campagne te sont acquises des amitiés en grand nombre et fort utiles. Malgré les ennuis qu'elle te procure, une candidature a quand même un avantage : tu peux, sans perdre la face, (chose que tu ne peux faire dans la vie ordinaire) prendre qui tu veux comme ami. Tu semblerais faire preuve de mauvais goût, si à un autre moment tu voulais être en relation avec eux, tandis que lors d'une candidature, si tu n'agis pas ainsi avec beaucoup de gens consciencieusement, on considérera que tu ne vaux rien comme candidat D'ailleurs, je peux t'assurer qu'il n'y a personne (à moins d'être lié à un de tes adversaires par quelque obligation) que tu ne puisses décider, si tu fais un effort, à ce qu'il considère qu'il mérite ton affection par ses bons services et que tu es son débiteur ou du moins qu'il comprenne que tu l'estimes très fort, que tu penses ce que tu dis, qu'il fait un bon placement, que l'amitié qui s'en suivra ne sera pas une amitié brève et qui ne dure que le temps des élections, mais une amitié solide et durable. Crois-moi, il n'y aura personne, s'il a la moindre intelligence, qui laissera tomber cette occasion qui lui est offerte de devenir ton ami, surtout quand par chance tu as comme concurrents des gens dont tu dois mépriser ou fuir l'amitié et qui ne peuvent non seulement obtenir ce que je te demande de faire mais encore ne peuvent même pas le commencer. Car comment Antonius pourrait-il s'attacher et demander leur amitié à des personnes qu'il ne peut appeler tout seul par leur propre nom ? Rien ne me semble plus stupide que d'imaginer un homme empressé à te servir alors que tu ne le connais pas. Il faut que la renommée soit extraordinaire, ainsi que la position politique et la grandeur des exploits pour que des inconnus, sans appuis, soient élus. Qu'une fripouille, sans énergie, sans fonction, sans capacités, avec une mauvaise réputation, sans amis, puisse l'emporter sur un homme fortifié par le zèle de la foule et par la bonne opinion de tous : cela ne peut arriver sauf négligence grave.

VIII. C'est pourquoi veille à être sûr d'avoir les voix de toutes les centuries grâce au nombre et à la variété de tes amis. D'abord (et c'est évident) entoure de tes soins les sénateurs et les chevaliers romains, ainsi que les gens influents et populaires de tous les autres ordres. En ville, il y a beaucoup d'hommes laborieux, dans le forum, beaucoup d'affranchis influents et actifs, fais en sorte que, dans la mesure où tu le peux, par toi-même ou par des amis communs, ils te désirent : travaille-les, va vers eux, envoie des gens chez eux, montre leur qu'ils te rendent le plus grand service. Ensuite passe en revue la ville entière, tous les collèges, les quartiers, le voisinage. Si tu réussis à ce que les notables deviennent tes amis, tu auras par eux facilement prise sur la foule. Tu dois avoir soin de loger dans ton esprit et de conserver dans ta mémoire l'Italie tout entière, comme elle est, avec ses parties et ses divisions, en sorte qu'il ne s'y trouve pas un municipe, une colonie, une préfecture, un endroit quelconque, où tu ne sois assuré de posséder un appui suffisant. Cherche, découvre partout, dans quelque contrée que ce soit, des personnes que tu puisses connaître, attacher à ta cause, soutenir quand elles faiblissent. Demande-leur de se mettre en campagne pour aller te quêter des voix dans leur voisinage et se faire, en ta faveur, de véritables candidats. Ils souhaiteront t’avoir comme ami s'ils voient que tu désires vraiment leur amitié. Assure-toi qu'ils le comprennent bien et parle particulièrement dans ce sens. Les gens des municipes et des tribus rustiques pensent qu'ils sont nos amis quand ils nous connaissent de nom: et s'ils pensent obtenir une protection pour eux-mêmes, ils ne perdent pas une occasion de t'obliger. Les autres et surtout tes concurrents ne les connaissent pas, toi tu les connais et tu verras facilement, sans quoi l'amitié est impossible. Mais cela n'est pas suffisant (bien que ce soit déjà énorme) si ne s'en suit pas un espoir de profit. Tu ne dois pas seulement paraître comme un nomenclateur mais aussi comme un ami sincère. Ainsi quand tu te seras fait bien voir dans les centuries par ceux-là même qui, par ambition, ont beaucoup de pouvoirs dans leurs tribus et quand tu auras conquis les autres qui ont de l'influence dans une partie de la tribu à cause de leurs attaches à un municipe, à leur voisinage ou à un collège, alors tu seras sur la bonne voie. Ensuite il me semble que les centuries des chevaliers, si tu t'y prends bien, peuvent te soutenir beaucoup plus facilement. D'abord il faut te faire connaître d'eux (ils sont peu nombreux), fais-leur des avances (il est beaucoup plus facile de gagner l'amitié de jeunes hommes à cette période de leur vie). De plus tu as à tes côtés la crème de la génération montante et les plus appliqués à l'étude. Et d'ailleurs, puisque tu fais partie de l’ordre équestre, ils suivront l'exemple de cet ordre, à condition que tu t'emploies à confirmer l'appui de ces centuries, non seulement par ta sympathie pour le bien général de cet ordre, mais également par ton amitié pour chacun d'eux. En conclusion, l'ardeur chaleureuse des jeunes à te soutenir, à t'accompagner, à te faire connaître, à t'entourer est une chose fort importante et fort honorable.

IX. Et puisque j'ai mentionné le cortège, je dois ajouter que tu dois veiller à en avoir chaque jour de chaque sorte et de chaque classe; car, de cette foule qui t'accompagne, on pourra conjecturer de l'appui que tu peux obtenir au Champ de Mars. Il y a trois sortes de visiteurs : il y a le solliciteur qui se présente chez toi le matin, ensuite celui qui t'escorte au forum et enfin celui qui fait du démarchage électoral Pour les visiteurs du matin, qui sont du tout venant et qui selon la mode actuelle, viennent en grand nombre, tu dois t'arranger pour qu'ils pensent que tu considères cette petite attention de leur part comme une chose très agréable. Montre à ceux qui viendront chez toi que tu les remarques; montre ta satisfaction aux amis de ceux qui leur répéteront; dis-le fréquemment aux personnes elles-mêmes. Ainsi des gens qui rendent visite à plusieurs candidats et qui observent qu'il y en a un qui fait vraiment attention à eux, deviennent immédiatement leur supporter et ne vont plus rendre visite aux autres; peu par peu ils passent de ton côté au lieu de rester neutres et deviennent de véritables partisans alors qu'avant ils ne faisaient que semblant. En outre, rappelle-toi soigneusement ceci : si tu entends dire ou si tu ressens que celui qui t'a promis quelque chose jette, comme on dit, de la poudre aux yeux, fais semblant de n'avoir rien entendu et de ne rien savoir; si quelqu'un essaye de se justifier parce qu'il se considère en faute, affirme que tu n'as jamais douté de sa sincérité et que tu n'a aucune raison de douter de lui. L'homme qui pense qu'il ne donne pas satisfaction ne peut jamais être un ami. Tu dois savoir, cependant, le véritable sentiment de chaque homme, afin que tu puisses décider la confiance que tu donneras à chacun d'eux. Deuxièmement, tu dois porter plus d'attention à ceux qui t'escortent au forum qu'à ceux qui viennent te voir le matin, fais leur comprendre et montre leur clairement que cela t'est toujours fort agréable et dans la mesure de tes possibilités descends au forum à des heures fixes. Une escorte quotidienne nombreuse produit une grande impression et confère une grande considération personnelle. La troisième catégorie est la foule de ceux qui te servent sans arrêt comme supporters. Fais en sorte qu'ils comprennent spontanément que tu te considères pour toujours comme leur obligé à cause de leur extrême bonté. Quant à tes débiteurs, exige que, tant que leur âge et leurs affaires le permettent, qu'ils t'assistent constamment et que ceux qui ne peuvent t'accompagner eux-mêmes trouvent des amis pour prendre leur place. Je pense vraiment (et je pense que cela est extrêmement important) que tu dois toujours être entouré par une grande foule. En outre, cela confère une grande réputation et une grande distinction d'être accompagné de ceux qui par tes soins ont été défendus, préservés et acquittés lors de procès. Fais-leur bien comprendre que puisque, par tes soins et sans avoir dû débourser un franc, certains ont gardé leurs biens, d'autres leur honneur, d'autres leur salut et toute leur fortune et que, puisqu'il n'y aura jamais d'autre moment pour qu'ils puissent montrer leur gratitude, ils doivent te rémunérer par ce service.

X. Et puisque on est en train de discuter à fonds de la question de la fidélité des amis, je ne dois pas, je pense, passer sous silence la prudence. La mauvaise foi, l'intrigue et la trahison sont partout. Ce n'est pas le moment de discuter sur la manière de distinguer un véritable ami d'un faux: tout ce qui est en place maintenant doit t'en donner une idée. Ton caractère fougueux a contraint beaucoup de gens à faire semblant d'être tes amis alors qu'en vérité ils sont vraiment jaloux de toi. C'est pourquoi rappelle-toi la phrase d'Epicharme, "les muscles et les os de la sagesse ne doivent rien croire à la légère." Ensuite, quand tu auras vraiment confiance en tes amis, tu dois alors t'occuper des motifs et de la variété de tes détracteurs et de tes adversaires. Il y en a de trois sortes : d'abord, ceux que tu as attaqués; en second lieu, ceux qui te détestent sans raison définie; troisièmement, ceux qui sont les amis fervents de tes concurrents. Pour ceux que tu as attaqués en plaidant la cause d'un ami contre eux, fais leur de plates excuses; rappele-leur tes obligations; donne-leur l'espoir que tu agiras avec la même ardeur et la même fidélité s’ils deviennent tes amis. Quant à ceux qui te détestent sans raison, fais de ton mieux pour leur enlever cette erreur de jugement en leur rendant un véritable service ou en leur donnant des espérances ou en indiquant ton attachement envers eux. Quant à ceux qui sont contre toi parce qu'ils sont les amis de tes adversaires, gratifie-les également de la même façon que les autres et si tu peux les amener à te croire, montre-leur que tu es bien disposé même envers tes concurrents.

XI Assez parlé de la façon de se faire des amis, on doit maintenant parler d'une autre partie de la tâche d'un candidat : il s'agit de se concilier le peuple. Cela exige le talent de se rappeler des noms, la flatterie, la persistance, la générosité, le pouvoir de lancer des rumeurs et de créer un sentiment d'espoir dans l'état. La première chose que tu as à faire c'est, parmi les gens que tu connais, identifier des personnes remarquables : continue à augmenter leur nombre et à les améliorer chaque jour. Rien ne me semble plus démagogue ou plus agréable. Ensuite, si la nature t'a refusé une qualité, fais semblant de l'avoir, afin que tu paraisses agir naturellement. Bien que tu ne manques pas de la courtoisie que les honnêtes gens possèdent, cependant tu as vraiment besoin de la flatterie, qui, même si elle est fautive et indigne en d'autres moments de la vie, est pourtant nécessaire lors d'une candidature au consulat. Cependant quand la flatterie rend un homme plus mauvais par complaisance, elle est malhonnête; mais si elle le rend plus amical, alors il ne faut pas la blâmer, elle est absolument nécessaire pour un candidat, dont le visage et l'expression et la conversation doit changer et s'adapter aux sentiments et au goût de ceux qu'il réunit. Pour ce qui est de la présence constante, il n'y a aucune règle étable, le mot lui-même parle par lui-même. Il est très important de ne pas aller n'importe où : le véritable résultat d'une présence constante c'est d'être non seulement à Rome et dans le forum, mais de faire une propagande continue, de s'adresser à plusieurs reprises aux mêmes personnes, de ne pas se risquer (dans la mesure de tes possibilités) à ce que quelqu'un ne puisse te dire que tu ne l'as pas sollicité et sollicité vraiment et scrupuleusement. Mais la générosité a aussi une large application : elle est dans de la gestion de ton patrimoine.
Même si elle n'atteint pas réellement les oreilles de la foule, cependant, si des amis en parlent avec éloge, tu gagnes la faveur de la multitude. Elle se trouve également dans les banquets : veille à ce qu'elle soit célébrée par tes amis et par toi-même et partout et dans les tribus. Il faut la travailler : répands-la partout, partage-la et veille à être accessible à tous jour et nuit non seulement par les portes de ta maison, mais par ton visage et ta mine, qui est la porte de l'esprit; en effet si elle révèle des sentiments cachés et dissimulés il importe peu que les portes de ta maison soient ouvertes. Les gens désirent non seulement qu'on leur fassent des promesses surtout lorsque cela vient d'un candidat mais qu'on les fasse largement et avec distinction. En conséquence il y a une règle de conduite facile : indique que ce que tu vas faire tu le feras avec passion et avec plaisir. Il est un peu plus difficile et c'est plutôt une concession aux nécessités du moment plus qu'à tes prédispositions, que, quand tu ne peux faire une chose que tu as promise, de refuser aimablement ou de ne pas dire non: le premier refus est celui d'un honnête homme, le second d'un bon candidat. Quand on te fait une requête à laquelle tu ne peux répondre dans l'honneur et sans dommage pour toi-même : par exemple si quelqu'un te demande de plaider contre un ami, tu dois refuser avec élégance : tu dois montrer que tu as les mains liées, tu dois afficher que tu es tout à fait désolé, tu dois le convaincre que tu lui donnera une compensation.

XII. J'ai entendu quelqu'un me dire au sujet de divers orateurs à qui il avait présenté sa cause "qu'il avait eu plus de satisfactions du discours de celui qui avait refusé que de celui qui avait accepté." Il est vrai que les gens sont plus sensibles aux manières et aux paroles qu'aux réels services rendus. Tu approuveras aisément ce dernier point, mais il est un peu plus difficile de recommander le suivant à un Platonicien comme toi, mais je dois pourtant ce conseil au vu des circonstances. En effet ceux à qui tu es forcé par obligation de refuser ton service peuvent cependant te quitter sans ressentiment et avec des sentiments amicaux. Mais ceux à qui tu refuses quelque chose en disant que tu es empêché par les affaires de tes meilleurs amis ou par des affaires plus importantes ou déjà en cours, ceux-là s'en vont fâchés; tels sont les hommes: tous sont disposés à préférer te voir mentir que te voir dire non. C. Cotta, un maître dans l'art oratoire, avait l'habitude de dire qu'à condition que la demande ne soit pas directement contraire à son devoir, il avait l'habitude de promettre son aide à tous et de consacrer son temps à ceux dont la reconnaissance lui semblait la plus avantageuse. C'est pourquoi il acceptait tout le monde parce qu'il arrivait souvent que la personne qui avait reçu sa promesse n'en réclamait point l'exécution et qu’il s'était souvent produit aussi que lui-même était moins occupé qu'il ne l'avait pensé; et il disait aussi qu'il ne pouvait remplir sa maison de clients car il n'acceptait que ce qu'il pouvait réaliser; que le hasard faisait arriver des causes auxquelles on ne pensait pas alors que d'autres qu'on croyait avoir bien en main restaient en suspens. La pire des choses, enfin, qui puisse se produire c'était d'offenser l'homme à une fausse promesse avit été faite. Cet inconvénient, en cas de promesse, est incertain, éloigné et affecte seulement quelques personnes; par contre, si vous refusez, l'offense faite est certaine, immédiate et plus largement ressentie.
En effet il y a beaucoup plus de gens qui veulent pouvoir compter sur les services d'autrui que ceux qui les utilisent effectivement. Il est par conséquent préférable qu'un jour, peut-être, certains se mettent en colère contre toi sur le Forum plutôt que tous le fassent sur-le-champ et dans ta maison: l'on s'énerve plus facilement contre ceux qui refusent le service que contre ceux qui sont clairement empêchés de tenir leur promesse, s’ils montrent qu'ils sont plein du désir de la satisfaire aussitôt qu'ils auront la moindre possibilité de le faire. Et parce qu'il me semble que je n'ai pas dévié de mon sujet en discutant de cela dans la partie réservée à la popularité lors d'une candidature, je puis faire remarquer que toutes les observations que je viens de faire influent moins sur le zèle de nos amis que sur notre réputation parmi la multitude. Bien qu'il y ait quelque chose dans ce que je dis qui relève du chapitre précédent - répondre avec affabilité et aider avec zèle les amis dans leur affaires et leur défense - je discute ici ces moyens comme étant propres à t'attirer les masses populaires : avoir ta maison remplie de visiteurs dès avant le lever du jour, attacher beaucoup de gens à toi en leur faisant miroiter l'espoir de ton appui, s'arranger pour qu'ils s'en aillent mieux disposés encore qu'ils n'étaient venus; enfin, faire en sorte que le plus grand nombre possible de citoyens entendent parler de toi de la manière la plus avantageuse.

XIII. Le thème suivant est le qu'en dira-t-on : il faut s'y conformer absolument. Mais ce que j'ai dit dans tout mon exposé antérieur s'applique aussi au qu'en dira-t-on : la réputation de ton éloquence; la faveur des publicains et de l'ordre équestre; la sympathie des nobles; la foule de jeunes hommes; la présence constante de ceux que tu as défendus; le nombre des personnes des municipes qui sont venues à Rome uniquement pour te voir; il faut qu'ils disent et pensent que tu les connais tous, que tu t'adresses à eux avec respect, que tu es un candidat assidu et sérieux, que tu es aimable et honnête. Il faut que ta maison soit remplie de visiteurs longtemps avant le point du jour, qu'il ait foule de chaque classe, que tes paroles donnent satisfaction à tous, tes actes et tes services au plus grand nombre possible, que tout ce qui peut se faire soit fait par un travail dur, par de la compétence et par de l'application pour que ta réputation n'arrive pas au peuple par ces personnes mais pour que ce soit le peuple lui-même qui leur apprennent la chose. Tu t'es déjà acquis la foule urbaine et l'attachement de ceux qui commandent les réunions publiques par ton panégyrique de Pompée, en soutenant la cause de Manilius, par ta défense de Cornelius. Tu ne dois pas laisser tomber ces avantages que jusqu'ici personne n'a eus sans posséder en même temps la faveur des gens connus. Tu dois veiller à faire savoir à tout le monde que Pompée te soutient totalement et que dans ses plans il désire absolument que tu gagnes les élections. Pour finir, fais en sorte que toute ta candidature soit pleine d'éclat, brillante, splendide, convenant au goût du peuple, présentant un spectacle très digne et magnifique. Veille aussi, si c'est possible, à mettre au jour un nouveau scandale contre tes concurrents pour crime ou débauche ou corruption, en fonction de leurs caractères.
Mais ce qui importe le plus dans cette élection c'est que la République ait une bonne et juste opinion de toi. Pendant ta candidature tu ne dois pas parler de mesures politiques au sénat ni en public: tu dois laisser ces choses en suspens pour que, de ta conduite de vie, le sénat puisse penser que tu es probablement le défenseur de son autorité; pour que les chevaliers romains, les gens de bien et les riches jugent, à partir de ton passé, que tu désires la paix et a tranquillité et pour que le peuple pense que tu n'es sans doute pas hostile à ses intérêts parce que dans ta façon de parler lors des réunions publiques et dans tes convictions avouées, tu as toujours eu la fibre populaire.

XIV. Voilà le fruit de mes deux réflexions matinales : j'ai dit que du devais les méditer chaque jour en descendant au forum : "je suis un homo novus," "je suis candidat au consulat." Il en reste une troisième "on est à Rome," une ville composée d'une mosaïque de nations, où on trouve beaucoup de pièges, beaucoup de fourberie, beaucoup de vices dans chaque domaine de la vie. Il faut supporter l'arrogance, l'obstination, la malveillance, l'orgueil, la haine et les embarras de beaucoup de monde. Je vois que cela exige une grande prudence et une grande compétence pour tant d'hommes vivant au milieu de vices variés et nombreux, d'éviter de mécontenter, d'éviter le scandale et de tomber dans des pièges, d'être l'homme unique qui s'adapte à une si vaste variété de caractères, de paroles et de désirs. C'est pourquoi continue à suivre le chemin que tu t'es tracé : améliore ton éloquence. A Rome c'est ce qui charme et attire les gens, mais aussi ce qui peut briser une carrière ou infliger des dommages. Et puisque la grande plaie de notre ville est l'oubli habituel de l'honneur et de la considération remplacés par la corruption, veille à être sûr de ta propre force, c.-à-d., sache que tu es l'homme capable de produire dans l'esprit de tes concurrents la crainte la plus forte d'un procès et d'une condamnation. Fais-leur savoir que tu les observes et que tu les contrôles: ils auront peur de ta vigilance, ainsi que de ton influence et de ta force de ta parole mais surtout de l'affection que te porte l'ordre équestre. Mais je ne souhaite pas te proposer cela pour que tu songes déjà à un procès mais pour que cette peur facilite tes projets et en un mot lutte de toutes tes forces et de tout ton talent à obtenir ce que tu désires. Je vois qu'il n'y a aucune élection aussi profondément ternie par la corruption mais je vois aussi que des membres d'une centurie élisent des gens avec qui ils sont étroitement liés sans recevoir l'argent. Par conséquent, si nous sommes vigilants au prestige de notre tâche, si nous soulevons nos partisans pour qu'ils y mettent toute leur énergie : si nous distribuons à chacun des hommes influents et puissants la tâche qu'il a à accomplir, si nous menaçons nos concurrents de procès, si nous faisons peur à leurs intermédiaires, si par n'importe quel moyen nous contenons les distributeurs d'argent, on peut en arriver à ce qu'il n'y ait aucune corruption ou qu'elle soit sera inefficace. Sur tout cela, j’ai pensé que je n'en savais pas plus que toi mais que je pouvais plus facilement que toi, vu tes occupations, réunir tout en un seul ensemble et te l’envoyer une fois écrit. Et bien que cela soit écrit en des termes qui ne peuvent s'appliquer à tous les candidats à une charge mais uniquement à ton cas spécifique et à ton élection particulière, pourtant je serais heureux si tu me disais tout ce qui devrait être corrigé ou entièrement enlevé ou ce que j'ai oublié. Je souhaite qu'on considère cet "Essai sur la candidature" comme une oeuvre achevée en tous points.

FIN DE L'OUVRAGE

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