Temple de Bellone:
Festus
BELLONA , nom de la déesse de la guerre : devant son temple était une petite colonne que l'on appelait bellica , et par-dessus laquelle on lançait un javelot lorsqu'on déclarait la guerre.
C'est une construction due à Appius Claudius Caecus qui avait fait un vœux pour son édification en 296 avant J.C. durant une guerre contre les Samnites et qui le concrétisa quelques années plus tard.
« Au milieu du combat, au moment décisif, Appius, dit-on, levant, en première ligne, les mains au Ciel de façon à être remarqué, pria ainsi : "Bellone, si aujourd'hui tu nous donnes victoire, je te dédie un temple." » Tite Live X, 19.
« Quand le matin sera venu deux fois, quand deux fois Phébus sera sorti de la mer, quand les gouttes de la rosée auront mouillé deux fois la tige des blés, ce sera le jour où fut consacré le temple de Bellone pendant la guerre de Toscane; toujours cette déesse protège le Latium. Ce fut un voeu d'Appius; et quand il refusa la paix à Pyrrhus, si les yeux du vieillard étaient fermés au jour, la sagesse du moins éclairait son esprit d'une vive lumière. [6, 205] Au-devant du temple, il est une place peu spacieuse d'où l'on aperçoit l'extrémité du Cirque; là s'élève une colonne, petite, mais d'un grand renom, d'où la main du fécial lance le javelot précurseur de la guerre, quand on a décidé de prendre les armes contre les rois et les nations. » Ovide, fastes, VI, 205.
On en a retrouvé aucune trace archéologique ce qui laisse sa position géographique incertaine mais on sait par les textes qu'il était au Champ de Mars, près du Cirque Flaminus , proche de la porte Carmentale , donc hors de l'enceinte sacrée où nul ne devait pénétrer avec une arme sur lui et où l'on ne devait jamais traiter d'affaires guerrière.
--- On peut voir au milieu de l'image, derrière, le théâtre de Marcellus, deux temples côte à côte, celui de Bellone est à gauche, celui de droite est voué à Apollon.
Image due à la maquette de A. Caron : http://www.maquettes-historiques.net/page4.html
Le Sénat s'y réunissait très souvent, il y recevait les ambassadeurs ou y délibérait sur l'octroi à tel ou tel général d'un triomphe ou d'une ovation (petit triomphe),
« Vers la fin de la même campagne, M. Marcellus étant revenu de la Sicile à Rome, le sénat, convoqué par le préteur C. Calpurnius, lui donna audience dans le temple de Bellone…il n'avait pas eu la liberté de ramener l'armée, et sollicita le triomphe;… » Tite Live, XXVI, 21.
« Peu de temps après arrivèrent les envoyés de T. Quinctius et ceux du roi. Les ambassadeurs macédoniens furent conduits hors de Rome, dans une villa de l'état, où ils furent logés et défrayés aux dépens du trésor. Ce fut au temple de Bellone que le sénat leur donna audience. » Tite Live, XXXIII, 22.
« Q- Fulvius Gillo, lieutenant de Scipion, amena les Carthaginois à Rome; on leur défendit d'entrer dans la ville et on leur assigna un logement dans une villa de l'état ; le sénat leur donna audience dans le temple de Bellone. » Tite Live, XXX, 21.
il accomplissait toutes les taches devant s'effectuer hors du pomerium . C'est à l'occasion d'une de ces réunions que les sénateurs entendirent les cris de 3.000 prisonniers que Sylla faisait égorger à l'hippodrome malgré ses promesses de vie sauve, détail qui laisse entrevoir sa situation géographique.
« Mais Sylla, ayant rassemblé tous ceux qui étaient restés de ces trois mille hommes et des autres, jusqu'au nombre dé six mille, les fit enfermer dans l'hippodrome, et assembla le sénat dans le temple de Bellone. Il commençait à parler aux sénateurs, lorsque des soldats qui avaient reçu ses ordres, tombant sur ces six mille prisonniers, les massacrèrent. Les cris de tant de malheureux, qu'on égorgeait à la fois dans un si petit espace, devaient s'entendre au loin. » Plutarque, vie de Sylla, 30.
Ce temple possédait deux autels, un qui servait à accomplir les rites d'une déclaration de guerre et un second qui permettait aux troupes défilant lors d'un triomphe de se voir purifier par un sacrifice.
Devant lui, sur le parvis, se tenait la columna bellica qui symbolisait le territoire ennemi vers lequel le fécial (prêtre) lançait son javelot en signe de déclaration de guerre. Il était décoré au I er siècle avant J.C. des portraits et des boucliers de la gens des Claudii qui l'avait construit ; son fondateur faisait partie de cette illustre famille et ses descendants l'entretenaient à travers les temps. C'était le point de départ des gouverneurs de province qui y passait pour faire un sacrifice comme ils le faisaient à leur retour.
Plutarque rapporte qu'un corps de cigale y fut déposé par un moineau ce qui fut considéré comme un mauvais présage. Sous l'Empire, Dion Cassius nous dit qu'Hadrien y fit élever une statue équestre du prince Pharasmane.
« La guerre des Juifs finit donc là ; mais une autre guerre, celle des Albains (ce peuple fait partie des Massagètes), fut excitée par Pharasmane et causa de grands ravages dans la Médie ; puis, après s'être étendue en Arménie et en Cappadoce, les Albains s'étant laissé gagner par les présents de Vologèse et redoutant Flavius Arrien, gouverneur de la Cappadoce , la guerre s'arrêta. [Vologèse et les Iazyges ayant envoyé des ambassadeurs, l'un pour se plaindre de certains actes de Pharasmane, les autres pour conclure la paix, Adrien les introduisit dans le sénat ; puis, ayant reçu de cette compagnie la commission de leur faire réponse, il rédigea par écrit sa décision et la leur lut. [L'Ibérien Pharasmane étant venu à Rome avec sa femme, Adrien augmenta ses Etats et lui permit d'offrir un sacrifice dans le Capitole ; il lui éleva une statue équestre dans le temple de Bellone, et assista aux exercices armés de ce prince, de son fils et des autres principaux Ibériens.] » Dion Cassius, Hadrien, 69. Traduction trouvée sur le site : http://www.mediterranees.net
Mais qui était Bellone pour prendre une telle place dans la vie de Rome ? C'était une déesse de la guerre. Elle était au féminin ce que Mars était au masculin. On la considérait comme la sœur ou la femme du dieu de la guerre, on ne connaît pas exactement quel était le lien qui les unissait. On pense qu'elle pourrait être d'origine sabine et s'identifier à la déesse Enyo des Grecs. Elle était représentée comme une conductrice de char qui avait une arme à la main et des cheveux comme des serpents. Plus tard, elle fut confondue avec Comana , divinité asiatique dont le culte fut introduit à Rome par Sylla après sa guerre contre Mithridate.
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